Publié le 23 déc 2024Lecture 3 min
Troubles bipolaires : un risque accru de rechute durant la grossesse et le post-partum
Denise CARO, d’après la communication du Pr Raoul Belzeaux (CHU de Montpellier)
La périnatalité est une période à risque de rechute ou d’aggravation de la maladie chez les femmes atteintes de troubles bipolaires. Elle peut aussi révéler le trouble de l’humeur qui s’exprime le plus souvent par une dépression. La prise en charge de ces patientes doit être pluridisciplinaire.
Le trouble de l’humeur bipolaire correspond à une variation, sur une période déterminée et significative, de l’humeur, de l’énergie, de l’activité et du sommeil. Elle s’exprime sous deux formes caractéristiques avec soit un tableau associant excitation, exaltation, insomnie, hyperactivité sans fatigue, soit à l’inverse la présence d’une dépression avec humeur maussade, un manque d’énergie, un arrêt des activités et une tendance à l’hypersomnie. Le trouble évolue de façon cyclique avec des intervalles libres et des périodes symptomatiques plus ou moins longues.
Il s’agit d’une psychopathologie particulièrement sévère, notamment en raison du retard de diagnostic (5 à 10 ans après le 1er épisode), où le risque de suicide est multiplié par 30. L’espérance de vie est réduite de 5 à 10 ans, le trouble bipolaire étant associé à une morbidité importante, cardiovasculaire, métabolique et inflammatoire, sans compter l’addiction au tabac, à l’alcool ou à d’autres toxiques (observée chez 30 à 50 % des patients). « Aussi les femmes souffrant d’un trouble bipolaire ont‐elles de nombreux problèmes de santé – psychiatriques, physiques, addictologiques – qui vont interférer avec les questions de la parentalité et de la grossesse qui sont souvent associées à un contexte psycho‐social difficile », a indiqué le Pr Raoul Belzeaux (CHU de Montpellier). La période périnatale (grossesse et 12 mois après l’accouchement) expose à un risque important d’aggravation ou de rechute. On estime à 25 % le nombre de rechutes durant la grossesse et à 52 % durant le post‐partum. Les symptômes sont le plus souvent dépressifs(1). « Il y a un phénomène d’emballement, a noté le Pr Belzeaux. L’apparition de symptômes pendant la grossesse multiplie par dix le risque de rechute au moment du post‐partum(1). »
Un surrisque pour la mère et l’enfant
Les quelques données de la littérature disponibles montrent un surrisque pour la femme et l’enfant : décompensations thymiques, comorbidités addictives accrues, faible poids de naissance, fré quence des hospitalisations en soins intensifs néonataux(2).
Les interrelations délétères entre maternité et trouble bipolaire participent probablement à une parentalité diminuée chez les patients (hommes et femmes) concernés par cette psychopathologie. Plusieurs raisons pour expliquer ce phénomène sont avancées : baisse du taux de fécondité (0,75 chez l’homme ; 0,50 chez la femme versus 1 pour la population générale), auto stigmatisation (peur de l’hérédité, de ne pas être capable, des traitements), stigmatisation par le système de soins et la société mais aussi addictions, obésité, syndrome métabolique, iatrogénie…
En cas de grossesse, la question de la poursuite du traitement (et de sa tératogénicité potentielle) se pose. L’arrêt du traitement multiplie par 2,5 les rechutes(3,4). La prise de valproate, de carbamazépine et/ou de topiramate n’est pas compatible avec une grossesse. Une métaanalyse montre que le maintien du lithium durant la grossesse divise par six le risque de rechute(5).
Cependant, le risque relatif de malformation fœtale en cas de prise de lithium durant le 1er trimestre de grossesse est de 1,75 par rapport à la population générale et par rapport à la population ayant des troubles bipolaires mais non exposée au lithium (TBNL) ; le risque relatif de malformation cardiaque est respectivement de 1,96 par rapport à la PG et de 1,75 par rapport à la population TBNL. Le risque de malformation cardiaque dépend grandement de la posologie ; il est de 1,1 pour une posologie < 600 mg/j et de 3,22 pour posologie > 900 mg/j(6). « La décision doit être pluridisciplinaire en incluant l’avis du couple », conclut le Pr Raoul Belzeaux.
D’après la communication du Pr Raoul Belzeaux (CHU de Montpellier), « Troubles bipolaires et maternité », Congrès Infogyn, octobre 2024.
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