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La France à l'international

Publié le 04 juil 2023Lecture 4 min

Endométriose : vers la possibilité d’un diagnostic par test non invasif

Daniel ROTTEN, Paris

Bendifallah S, Suisse S, Puchar A et al. Salivary microRNA signature for diagnosis of endometriosis. J Clin Med 2022 ; 11 : 612 (11-12).

Deux équipes françaises ont récemment publié des articles concernant la prise en charge de patientes porteuses d’endométriose. L’article de Sofiane Bendifallah et coll. concerne la mise au point d’un test diagnostique non invasif. L’article de Louis marcellin et coll. réévalue (à la baisse), les conséquences de la pathologie endométriosique sur la grossesse lorsque celle-ci survient. il s’agit d’avancées importantes, justifiant leur parution dans la littérature internationale, même si, dans les deux cas, les résultats demandent à être confortés par des études complémentaires.

Sofiane Bendifallah et coll. proposent l’utilisation d’un test biologique pour établir en pratique clinique le diagnostic d’endométriose. Ce test, qui peut être réalisé sur un simple prélèvement salivaire, repose sur l’expression différentielle de micro-ARN en cas d’endométriose. L’étude émane d’équipes françaises, groupées autour du Centre expert de l’endométriose de l’hôpital Tenon.   Petit rappel de biochimie Les micro-ARN sont des acides nucléiques de petite taille (une vingtaine de nucléotides environ). Ils ne sont pas codants. Leur rôle est de réguler l’activité des ARN messagers qui, eux, sont codants pour des protéines. Les micro-ARN (ou miARN) agissent sur les ARN messagers au niveau post-transcriptionnel. La liaison des miARN à leurs ARN messagers complémentaires conduit à inhiber la traduction de ces derniers, ou même à provoquer leur dégradation (figure). Près de 60 % des ARN messagers sont régulés par un miARN. Le miARNome, c’est-à-dire l’ensemble des miARN codés par le génome, comporte environ 2 600 miARN caractérisés. Les miARN sont synthétisés au niveau des noyaux cellulaires. Ils sont ensuite transférés vers le cytoplasme. Une partie se re - trouve dans différents liquides biologiques, dont la salive. La composition qualitative et quantitative du miARNome reflète l’activité des tissus à un moment donné. Il peut s’agir d’activité métabolique mais également de synthèses pathologiques, émanant par exemple de tissus anormaux, comme le tissu carcinomateux. Le tissu endométrial compte parmi ceux ayant une expression aberrante de miARN. L’analyse du miARNome montre alors un profil spécifique, appelé signature. Figure. Micro-ARN et ARN messagers. Les micro-ARN se lient à leur ARM messager complémentaire et régulent leur activité. Ils inhibent leur traduction et peuvent même provoquer leur dégradation.   Patientes Deux cents patientes sont incluses dans l’étude. Toutes se plaignent de symptômes amenant à discuter le diagnostic d’endométriose. Elles sont réparties en deux groupes. Le groupe « endométriose » comprend 153 patientes chez lesquelles une endométriose est documentée. Le diagnostic est porté pour moitié par imagerie et pour moitié par chirurgie complétée par un examen histologique. Dans 52 % des cas, l’affection est aux stades I-II de la classification de l’ASRM et dans 48 % aux stades III-IV. Le groupe témoin comporte 47 femmes. Les symptômes dont elles se plaignent sont évocateurs d’une endométriose, comme une dysménorrhée sévère, une dyspareunie profonde, des douleurs urinaires périmenstruelles, etc., mais l’évaluation permet d’écarter ce diagnostic. Chez les patientes du groupe témoin, il existe dans la moitié des cas des anomalies gynécologiques, dont les plus fréquentes sont des fibromes et des pathologies kystiques ovariennes. Dans l’autre moitié, aucune pathologie organique n’est constatée (patientes dites « à symptomatologie discordante »).   Le test Mise au point Le test repose sur l’identification des miARN dont l’expression diffère entre patientes atteintes ou non d’endométriose. Le premier temps est le séquençage de nouvelle génération (NGS) du génome entier. Les profils de miARN de chacun des 200 échantillons sont comparés à la bibliothèque des 2 561 miARN connus. Les miARN discriminants (109 miARN) sont regroupés en un ensemble diagnostique en utilisant un algorithme de validation interne croisée. Cette étape a abouti à la détermination d’une signature. Performances Établie sur des jeux de données issues de la base, la sensibilité pour le diagnostic d’endométriose atteint 96,7 % ; la spécificité est de 100 % ; l’aire sous la courbe ROC est de 98,3 %.   Commentaire Ce test s’inscrit tout à fait dans la démarche actuelle dans l’endométriose, qui vise à la fois à diminuer le délai entre premiers symptômes et diagnostic, et à porter le diagnostic sans recours systématique à un abord opératoire. Le test présente de nombreux intérêts. Sa performance, tout d’abord, élevée ; sa versatilité, ensuite. Il reconnaît sans exclusive les différents phénotypes d’endométriose. Il permet le diagnostic des formes débutantes (ASRM stades I-II) et des formes évoluées (ASRM stades III-IV). Il discrimine correctement les patientes sans atteinte endométriosique, qu’elles aient une pathologie fonctionnelle ou organique. Enfin, en pratique, le prélèvement sur salive simplifie les problèmes logistiques. Un point de prudence cependant. Les performances affichées reposent sur une validation interne. Seule une validation externe permettra de renforcer leur validité.   NOTE PRATIQUE Le test a été développé dans le cadre d’un partenariat public-privé avec la start-up lyonnaise Zewig. Pour sa mise à disposition, il est en attente de validation par la HAS. Prix et taux éventuel de prise en charge par l’Assurance maladie ne sont pas encore connus à la date de rédaction.

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