Publié le 25 sep 2006Lecture 10 min
Quelle contraception après un cancer du sein
P. This, Institut Curie Paris, hôpital de Versailles
Chez les femmes qui ne sont pas ménopausées au moment du diagnostic d’un cancer du sein, la question de la contraception doit impérativement être abordée. Le choix de celle-ci sera conditionné par l’âge de la patiente, la nécessité ou non d’une contraception régulière, ses antécédents gynécologiques, ses projets de grossesse ultérieure et l’état de sa fonction ovarienne, parfois modifiée par les traitements du cancer du sein. Des situations cliniques très variées Après le traitement d’un cancer du sein débutant, chez les femmes qui n’étaient pas ménopausées au moment du diagnostic, la fonction ovarienne dépend de l’âge de la femme et des traitements adjuvants du cancer du sein : pour certaines, absence de traitement adjuvant (cancer intracanalaire), pour d’autres chimiothérapie et/ou tamoxifène, parfois adjonction d’un agoniste de la LH-RH. En revanche, les inhibiteurs de l’aromatase ne peuvent être prescrits actuellement chez une femme non-ménopausée au moment du diagnostic du cancer du sein.
Chez les femmes qui ne sont pas ménopausées au moment du diagnostic d’un cancer du sein, la question de la contraception doit impérativement être abordée. Le choix de celle-ci sera conditionné par l’âge de la patiente, la nécessité ou non d’une contraception régulière, ses antécédents gynécologiques, ses projets de grossesse ultérieure et l’état de sa fonction ovarienne, parfois modifiée par les traitements du cancer du sein. Des situations cliniques très variées Après le traitement d’un cancer du sein débutant, chez les femmes qui n’étaient pas ménopausées au moment du diagnostic, la fonction ovarienne dépend de l’âge de la femme et des traitements adjuvants du cancer du sein : pour certaines, absence de traitement adjuvant (cancer intracanalaire), pour d’autres chimiothérapie et/ou tamoxifène, parfois adjonction d’un agoniste de la LH-RH. En revanche, les inhibiteurs de l’aromatase ne peuvent être prescrits actuellement chez une femme non-ménopausée au moment du diagnostic du cancer du sein. Les conséquences de la chimiothérapie sur la fonction ovarienne Après chimiothérapie, alors que les femmes jeunes de moins de 38-40 ans conservent des cycles plus ou moins réguliers, les femmes plus âgées vont voir s’installer une aménorrhée de durée variable. Le risque d’insuffisance ovarienne après chimiothérapie est plus important avec certains composés comme le cyclophosphamide, en cas de doses cumulées élevées, et chez les femmes les plus âgées. L’aménorrhée s’installera d’autant plus vite que l’âge de la femme augmente. En pratique On ne peut parler stricto sensu de ménopause chimio-induite qu’au terme de 2 années sans règles. De plus, comme des ovulations restent toujours possibles, le médecin sera nécessairement amené à délivrer un message paradoxal à une femme en aménorrhée post-chimiothérapie : il lui faudra à la fois la prévenir du risque d’insuffisance ovarienne et lui proposer une contraception. Les effets du tamoxifène sur la fonction ovarienne Lorsque du tamoxifène est prescrit, que ce soit isolément ou dans les suites d’une chimiothérapie, la fonction ovarienne est très variable d’une femme à l’autre. • Les femmes de moins de 40 ans gardent souvent des cycles réguliers. • En revanche, après la quarantaine, peut s’installer une aménorrhée qui n’est cependant pas synonyme de ménopause : les taux d’estradiol ne sont pas effondrés. En général, ils s’élèvent plutôt. Si certaines gardent des taux d’estradiol acceptables, notamment après chimiothérapie, on retrouve parfois chez d’autres des taux franchement augmentés, entre 1 000 et 1 200 pg/ml. En effet, par son effet antiestrogénique sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, le tamoxifène induit une stimulation hypophysaire et ovarienne. Malgré cette élévation des taux d’estradiol, il reste efficace sur la maladie mammaire et ce, tant que le rapport des concentrations intramammaires de tamoxifène et d’estradiol reste de l’ordre de 1 000, ce qui est en général le cas pour des estradiolémies inférieures à 1 000 pg/ml. Soulignons que la prise de tamoxifène chez la femme non-ménopausée nécessite un suivi gynécologique très régulier. Ce composé peut notamment favoriser l’augmentation de taille de fibromes utérins préexistants, et la survenue de pertes vaginales, de prurits, de polypes utérins, et de kystes ovariens, en général asymptomatiques. En cas de kystes ovariens multiples, gênants, ou de taux d’estradiol trop élevé, un traitement par agonistes de la LH-RH pendant 3 mois permet la régression complète des kystes dans les deux mois. Ensuite, chez deux tiers des femmes, les taux d’estradiol restent bas pendant au moins 13 mois. Le tamoxifène étant inducteur de l’ovulation et, de plus, tératogène chez l’animal, une contraception efficace est indispensable. Comment choisir une contraception après un cancer du sein ? La théorie… D’une manière générale, il paraît logique d’éviter chaque fois que faire se peut tous les composés hormonaux ; de fait, l’augmentation du risque de cancer du sein retrouvée chez les femmes ménopausées sous traitement hormonal de la ménopause (THM) associant un estrogène et un progestatif de synthèse, ainsi que l’augmentation du risque de récidive sous THM chez les femmes participant à l’étude HABITS (THM versus pas de traitement chez des femmes ménopausées après cancer du sein) incitent à la plus grande prudence. La récente expertise collective sur les stratégies de choix des méthodes contraceptives, publiée en 2004 sous l’égide de l’ANAES et l’AFSSAPS, a bien détaillé les différents modes de contraception possibles et ce qui est envisageable après un cancer du sein. Elle reprend les 4 catégories décrites par l’OMS : Catégorie 1 : situation où la méthode contraceptive peut être utilisée sans aucune restriction. Catégorie 2 : situation où les avantages de la méthode contraceptive sont généralement supérieurs aux inconvénients. La méthode est utilisable sous réserve d’un suivi médical plus attentif. Catégorie 3 : situation où les risques théoriques ou avérés l’emportent sur les avantages procurés par l’emploi de la méthode. L’emploi de celle-ci n’est pas recommandé, à moins que des méthodes plus indiquées ne soient pas disponibles ou acceptables. Un suivi rigoureux est nécessaire. Catégorie 4 : situation où l’emploi de la méthode expose à un risque inacceptable pour la santé. Il est recommandé de ne pas utiliser la méthode. Cependant, fait important : la classification effectuée ne tient pas compte des degrés d’efficacité des différentes méthodes contraceptives, lesquelles sont à prendre en compte par le prescripteur ! Globalement, les méthodes dites « neutres » sur le plan hormonal sont classées dans la catégorie 1 : elles seront privilégiées à chaque fois que possible après un cancer du sein traité. Les préservatifs (notamment masculins) sont envisageables chez les femmes qui n’ont qu’une activité sexuelle occasionnelle, surtout si, après chimiothérapie, leur fonction ovarienne est perturbée. Soulignons qu’ils seront, en revanche, tout à fait insuffisants chez les jeunes femmes fertiles, car le taux d’échecs de cette méthode est important, notamment en utilisation « courante ». Le dispositif intra-utérin au cuivre est clairement, à chaque fois que sa pose est possible, la méthode à privilégier après un cancer du sein. Sa pose peut donc être encouragée, notamment chez les femmes qui ont déjà eu des enfants, et qui n’ont pas de facteurs de risque de maladies génitales hautes (partenaires multiples). Actuellement, selon l’expertise, cette méthode n’est pas qu’une méthode de 2e intention, et peut même être proposée aux femmes nullipares, sous réserve des conditions évoquées plus haut (absence de malformation utérine, pas d’antécédents d’infection génitale haute, partenaire unique). La stérilisation tubaire à visée contraceptive est une option qui peut être proposée aux femmes qui ne souhaitent pas d’autres grossesses, après information complète et le délai de réflexion requis de 4 mois. À cet égard, la méthode de stérilisation ESSURE (pose d’implant par hystéroscopie) apporte un réel avantage puisqu’elle est réalisable en ambulatoire. Tous les composés hormonaux, quels que soient les composés (estroprogestatifs ou progestatifs) et leur voie d’abord (comprimé, patch, anneau, implant, dispositif intra-utérin) sont classés dans la catégorie 4, puis dans la catégorie 3 si le cancer du sein est en rémission depuis plus de 5 ans. …et la pratique En fait, si l’on prend en compte l’efficacité réelle de ces différentes méthodes en usage courant, il s’avère que même en appliquant avec la plus grande rigueur les recommandations qui précèdent, certaines situations s’avèreront très délicates pour le prescripteur. Que faire notamment chez une femme jeune, fertile, souhaitant une grossesse à moyen terme, présentant une contre-indication formelle au dispositif intra-utérin, et dont le partenaire refuse l’usage des préservatifs ? Dans ce cas en effet, « les méthodes plus indiquées ne sont ni disponibles ni acceptables ». Une autre situation difficile concerne les femmes qui présentent des ménorragies importantes sous stérilet, résistantes aux protecteurs vasculaires, récidivant après curetage, et qui souhaitent préserver leur fertilité à long terme. Dans ces cas, certaines équipes acceptent à contrecœur la prescription de progestatifs (dans la première situation), ou d’un dispositif intra-utérin à la progestérone (dans la deuxième), ces prescriptions étant moins problématiques à distance du cancer du sein. Soulignons qu’actuellement, nous ne disposons pas de données solides sur l’effet de la prescription d’un progestatif après cancer du sein, sur les interactions entre tamoxifène et progestatifs, et sur l’effet différentiel des molécules, des doses, et des voies d’administration… Pour d’autres équipes, une alternative peut également se discuter chez les femmes très jeunes, dans les suites immédiates du cancer du sein : elle consiste à proposer, pendant une durée à déterminer, la prescription d’un agoniste de la LH-RH (et ce, hors AMM) : ce composé bloquera l’ovulation en maintenant des taux d’estradiol très bas, avec une tolérance très variable d’une femme à l’autre. Points à retenir Réfléchir en termes de stratégie bénéfice/risque et opposer les risques théoriques d’une contraception à la survenue d’une grossesse non-désirée, voire médicalement inopportune. En cas de difficultés, discuter les choix possibles de façon collégiale (à la demande du gynécologue, le dossier de la patiente peut être soumis en réunion de concertation pluridisciplinaire). Prendre une décision médicale partagée avec la patiente, en lui expliquant clairement les avantages, les inconvénients et les incertitudes de chaque méthode contraceptive. Conclusion Dans la grande majorité des cas, l’instauration d’une contraception après un cancer du sein traité ne pose pas de problèmes. Le point le plus important est d’y penser. Les méthodes neutres, c’est-à-dire non-hormonales, doivent être privilégiées chaque fois que possible. La stérilisation tubaire est une option qui mérite d’être discutée, notamment chez les femmes qui n’ont plus de souhait de grossesse. Dans de rares cas, la stratégie de choix est délicate et doit être bien formalisée.
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