Utérus
Publié le 13 nov 2007Lecture 10 min
Que reste-t-il de l’indication de la vaporisation laser ?
X. CARCOPINO Royal College of Surgeons Ireland, Dublin
La vaporisation laser est un traitement de choix des lésions intra-épithéliales de bas grade persistantes plus de 18 mois chez la femme jeune. Si la résection à l’anse diathermique reste le traitement de référence des lésions intra-épithéliales de haut grade (LIEHG), la connaissance de la morbidité obstétricale et donc périnatale de la conisation chirurgicale et de l’électro-résection à l’anse diathermique, associée au bénéfice du test HPV dans le suivi post-thérapeutique, incite à reconsidérer l’emploi de la vaporisation laser pour le traitement des LIEHG de la femme jeune nullipare ou émettant un désir de grossesse.
Si la vaporisation laser a été largement utilisée dans les années 80 pour le traitement des lésions intra-épithéliales (LIE) du col de l’utérus, elle a peu à peu été délaissée au profit des méthodes de résection comme la conisation chirurgicale et surtout l’électro-résection à l’anse diathermique ou LLETZ (Large Loop Excision of the Transformation Zone). Actuellement, sa principale indication reste le traitement des lésions intra-épithéliales de bas grade (LIEBG) persistantes plus de 18 mois(1). Parfois, elle est également utilisée pour le traitement des ectropions hypersecrétants. La vaporisation au laser présente de réels avantages. Il s’agit d’une technique simple et rapide, ne nécessitant pas d’anesthésie générale et pouvant donc être utilisée en ambulatoire. Elle permet également une surveillance post-thérapeutique aisée, puisque n’entraînant que très rarement une sténose de l’orifice cervical. Enfin, sa morbidité est très faible et son coût modeste. L’impossibilité de toute analyse anatomopathologique de la portion de col traitée est le principal défaut de cette technique. Celle-ci expose au risque de méconnaître un cancer invasif débutant. C’est essentiellement pour cette raison que la vaporisation laser a été exclue de l’arsenal thérapeutique des LIE de haut grade (LIEHG). La récente publication d’une large métaanalyse(2) mettant en évidence la morbidité obstétricale des techniques de résection ainsi que l’apport du test HPV dans le suivi post-thérapeutique des patientes traitées pour une LIEHG(3,4) incite à reconsidérer l’utilisation de la vaporisation laser pour le traitement des LIEHG de la femme jeune sans enfant ou ayant un désir de grossesse. Une efficacité thérapeutique réelle C’est exclusivement par crainte de méconnaître un cancer invasif débutant que la vaporisation laser a été exclue des méthodes de traitement des LIEHG. Pourtant, aucun argument scientifique réel ne permet de justifier ce choix et à ce jour, aucune publication n’a montré de risque significativement plus élevé de cancer infiltrant après vaporisation laser comparativement aux autres méthodes thérapeutiques comme la conisation chirurgicale ou la résection à l’anse diathermique. Dans une large étude rétrospective multicentrique regroupant 44 699 cas dont 2 116 avec un suivi post-thérapeutique de 8 ans, Soutter et coll. ont évalué le risque de cancer infiltrant après traitement par vaporisation laser, cryothérapie, conisation au laser et électro-résection à l’anse diathermique pour LIE(5). Cette étude concluait à un risque de cancer infiltrant, équivalent entre ces 4 méthodes thérapeutiques, avec un risque cumulé à 8 ans de 5,8 pour 1 000 femmes. Quel que soit le traitement conservateur utilisé, le risque de cancer infiltrant après traitement conservateur d’une LIE reste 4 à 5 fois plus élevé que dans la population générale(5). Avec un taux de succès pour le traitement des LIEHG de 90 à 95 %(6), l’efficacité thérapeutique de la vaporisation laser est réelle et comparable à celle des autres méthodes existantes. Cette efficacité a été récemment illustrée par Fallani et coll.(7). Dans cette étude rétrospective d’une cohorte de 159 patientes traitées pour LIEHG, 131 CIN2 et 28 CIN3, les auteurs ont observé un taux de succès thérapeutique de 87,4 % et aucun cas de cancer infiltrant après un suivi moyen de 7,1 ans (suivi minimum de 5 ans). La vaporisation au laser reste donc une alternative thérapeutique efficace pour le traitement des LIEHG du col de l’utérus. Elle est d’ailleurs présentée comme telle dans la dernière recommandation éditée par l’ANAES en 2002(1). Cependant, pour garantir cette efficacité, le colposcopiste doit s’assurer de détruire une profondeur de 5 à 8 mm sur l’ensemble de la zone traitée(8,9). Seule cette profondeur de destruction permet de s’assurer de la destruction des cryptes glandulaires cervicales, potentiellement envahies. Primum non nocere La morbidité obstétricale des traitements conservateurs des LIE, tels que la conisation chirurgicale et la résection à l’anse diathermique, a été récemment mise en évidence par Kyrgiou et coll.(2). D’après les résultats de cette métaanalyse, la conisation chirurgicale expose les patientes à un risque significativement accru d’accouchement prématuré (Risque Relatif [RR] = 2,59 ; intervalle de Confiance [IC] à 95 % = 1,8-3,72), mais également de poids de naissance inférieur à 2 500 grammes (RR = 2,53 ; IC à 95 % = 1,19-5,36) et d’accouchement par césarienne (RR = 3,17 ; IC à 95 % = 1,07-9,40). L’électro-résection à l’anse diathermique serait également un facteur de risque d’accouchement prématuré (RR = 1,70 ; IC à 95 % = 1,24-2,35), de poids de naissance inférieur à 2 500 grammes (RR = 1,82 ; IC à 95 % = 1,09-3,06), mais aussi de rupture prématurée des membranes (RR = 2,69 ; IC à 95 % = 1,62-4,46). Le risque d’accouchement prématuré après conisation au laser semble également être accru, mais avec des valeurs à la limite de la significativité (RR = 1,71 ; IC à 95 % = 0,93-3,14). En revanche, la vaporisation laser n’entraînerait pas de morbidité obstétricale (RR d’accouchement prématuré = 0,87 ; IC à 95 % = 0,63-1,20). Cette innocuité obstétricale de la vaporisation laser a été également observée dans une large étude rétrospective incluant 1 951 patientes traitées pour LIE dont 1 005 traitées par vaporisation laser (Bruinsma et al. BJOG 2007). Dans une population cible dont l’âge moyen est de 30 ans, la connaissance de la morbidité obstétricale et donc périnatale des techniques de résection incite à éviter, si possible, leur emploi chez les femmes jeunes nullipares ou ayant un désir de grossesse. Apport du test HPV dans le suivi post-thérapeutique L’apport du test HPV dans le suivi post-thérapeutique des patientes traitées pour LIE du col de l’utérus est maintenant bien connu. Un test HPV positif dans le suivi post-thérapeutique d’une LIE est significativement associé à la présence d’un échec thérapeutique (p < 0,0001)(3). Avec une sensibilité significativement plus élevée et une spécificité équivalente, le test HPV est plus performant que la cytologie pour dépister une lésion résiduelle ou une récurrence(4). Son excellente valeur prédictive négative (99 à 100 %) permet enfin de s’assurer du succès du traitement d’une LIE. S’il ne remplace pas l’analyse histologique de la portion de col détruite lors d’une vaporisation laser, le test HPV permet de s’assurer du succès thérapeutique ou au contraire de faire rechercher un échec du traitement ou une récurrence précoce justifiant d’une exploration colposcopique rigoureuse complétée par la réalisation de biopsie(s) cervicale(s). Des candidates potentielles sélectionnées Lors de la prise en charge d’une LIEBG du col de l’utérus chez une femme jeune nullipare ou émettant un désir de grossesse, la connaissance de la morbidité obstétricale de la conisation chirurgicale et de l’électro-résection à l’anse diathermique(2,10), associée au fait que seule une minorité de patientes évoluera vers un cancer infiltrant(11,12) doit faire éviter les méthodes de résection. L’abstention thérapeutique et le suivi régulier des patientes par l’association cytologie-colposcopie sont recommandés. La persistance d’une LIEBG à 18 mois doit faire indiquer un traitement et la vaporisation laser est, dans ce cas, la méthode de choix. Même si l’électro-résection à l’anse diathermique est le traitement de référence des LIEHG, la vaporisation au laser constitue une alternative thérapeutique valable. Cependant, l’impossibilité d’analyser la portion de col détruite impose la plus grande prudence et peut faire craindre la méconnaissance d’un cancer infiltrant débutant. Pour le traitement d’une LIEHG, la vaporisation au laser peut être proposée à une femme jeune nullipare ou émettant un désir de grossesse uniquement si toutes les conditions suivantes sont réunies : – colposcopiste expérimenté, – visibilité totale de la zone de transformation et de ses limites (inférieure et supérieure), – lésion de petite taille, de siège uniquement exocervical et entièrement visible à la colposcopie, – évaluation préthérapeutique documentée par biopsie(s) cervicale(s), – parfaite concordance entre les résultats de la cytologie, de la colposcopie et de l’histologie, – patiente acceptant de se soumettre à un suivi post-thérapeutique régulier et prolongé associant la cytologie, la colposcopie et un test HPV Points forts Morbidité obstétricale de la conisation chirurgicale et de la résection a l’anse diathermique D’après les résultats de la métaanalyse de Kyrgiou et coll. : La conisation chirurgicale est un facteur de risque d’accouchement prématuré, de poids de naissance inférieur à 2 500 grammes et d’accouchement par césarienne. L’électrorésection à l’anse diathermique est un facteur de risque d’accouchement prématuré, de poids de naissance inférieur à 2500 grammes et de rupture prématurée des membranes. Apport du test HPV dans le suivi post-thérapeutique Après le traitement d’une lésion intra-épithéliale du col de l’utérus, le test HPV est plus performant que la cytologie pour dépister une lésion résiduelle ou une récurrence. Son excellente valeur prédictive négative (99 à 100 %) permet de valider le succès thérapeutique, alors qu’un test HPV positif est significativement associé à la présence d’un échec thérapeutique. Indications de la vaporisation laser Chez la femme jeune nullipare ou émettant un désir de grossesse, la vaporisation au laser est le traitement de référence des lésions intra-épithéliales de bas grade lorsqu’elles persistent plus de 18 mois. La vaporisation laser peut être proposée à une femme jeune nullipare ou désirant une grossesse et qui acceptera un suivi régulier si les conditions suivantes sont réunies : lésion de petite taille, de siège uniquement exocervical, totalement visible à la colposcopie, documentée par biopsie(s) et pour laquelle les résultats de la cytologie, de la colposcopie et de l’histologie sont concordants. En pratique La récente mise en évidence de la morbidité obstétricale des techniques de résection et l’apport du test HPV dans le suivi post-thérapeutique des patientes incitent à reconsidérer l’utilisation de la vaporisation au laser dans le traitement des LIE du col de l’utérus de la femme jeune sans enfant. Si elle est une méthode thérapeutique de choix pour le traitement des LIE de bas grade persistant plus de 18 mois, la vaporisation laser est également une alternative thérapeutique efficace à la conisation chirurgicale et à l’électro-résection à l’anse diathermique pour le traitement des LIEHG. Dans ce cas, l’absence d’analyse histologique de la portion de col détruite reste son principal défaut et fait préférer les techniques de résection. Cependant, en cas de LIEHG, la vaporisation laser peut être proposée à une femme désirant une grossesse et qui acceptera un suivi régulier si les conditions suivantes sont réunies : lésion de petite taille, de siège uniquement exocervical, totalement visible à la colposcopie, documentée par biopsie(s) et pour laquelle les résultats de la cytologie, de la colposcopie et de l’histologie sont concordants.
Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.
pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.
Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :
Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :