Publié le 29 juil 2010Lecture 4 min
Le froid par maléfice ?
Philippe BRENOT, Directeur DIU de sexologie, Université Paris Descartes
Les termes populaires pour parler du trouble érectile ont un caractère très imagé qui décrit cependant bien la clinique : on parlait autrefois d’un pousse-mou ou d’un pisse-froid, car cet homme handicapé de l’érection avait perdu la clé du dressoir, s’endormait sur le rôti, ou faisait fausse-queue ! Les causes de l’impuissance étaient alors très simples, quelqu’un ayant lancé un sort, c’est ce que l’on appelait le froid par maléfice*.
Les temps ont changé, on parle aujourd’hui populairement de « panne sexuelle », défaut d’érection émotionnel et occasionnel, le plus souvent sans lendemain, mais qui provoque souvent des réactions secondaires majeures par l’angoisse, la honte, la culpabilité qu’il réveille. Une attitude féminine bienveillante contribue à la banalisation de ce moment de défaillance et la majorité des partenaires (surtout dans les jeunes générations) ont aujourd’hui des gestes et des mots d’accompagnement rassurants : « Ce n’est pas grave, ne t’inquiètes pas… ». Cette réassurance, qui est certainement la meilleure attitude au début d’un trouble émotionnel, permettra dans la plupart des cas que le symptôme ne se pérennise pas. Dans d’autres circonstances, il aura souvent suffi d’une seule réflexion négative : « Oh, non ! T’arrêtes pas comme ça ! » « C’est fichu ! » « T’es pas un homme ! », pour que le trouble s’installe durablement en raison du lien fort de la détumescence pénienne avec la culpabilité et la crainte du désamour. L’angoisse d’anticipation s’installera ensuite pour provoquer une cascade d’échecs échappant alors à la commande consciente. Trouble émotionnel Il faut savoir qu’un trouble émotionnel fréquemment renouvelé va ensuite s’organiser de façon fonctionnelle et même organique. L’émotion s’organise dans le corps par le biais de réactions émotionnelles incoercibles. En cela, il est important d’informer, de conseiller et éventuellement d’orienter de façon spécialisée avant que le trouble ne se pérennise. Il existe des causes organiques, ou de fragilisation, qui devront être systématiquement recherchées car le trouble érectile est, la plupart du temps, mixte : un facteur organique ou une fragilité fonctionnelle, qui n’est pas suffisante pour faire symptôme, donnera un trouble érectile organisé si de l’émotion, de l’angoisse, de la culpabilité, des sentiments négatifs lui sont associés. Des circonstances conjugales pourront également être en cause, comme un défaut d’excitation, une absence d’érotisme, des difficultés de la partenaire à avoir du désir ou à éprouver du plaisir. La sexualité est avant tout un échange de signaux entre deux partenaires. Les caresses, les mots, les pressions amoureuses sont des signaux destinés à notre propre excitation, mais sont aussi des messages en direction du partenaire. C’est ainsi qu’une chaîne s’installe pour permettre la montée de l’excitation : je te caresse et sens tes caresses en retour, je t’embrasse, te serre contre moi et ressens tes réactions. L’absence de signaux de la part du partenaire empêche alors la montée de l’excitation et peut, par exemple chez l’homme, être un facteur de chute de l’excitation. Devant une plainte féminine de défaillance du partenaire (« il bande mou ») il est intéressant d’explorer l’éroticité de cette femme qui s’en plaint, comprendre son attitude devant l’amour : passivité, accompagnement, activité, activisme… Les attitudes trahissent notre degré de liberté par rapport à la pudeur, au ressenti corporel, à la proximité du partenaire, à son état d’excitation. Cet inventaire sensuel et émotionnel est essentiel pour comprendre le vécu sexuel quand il est en difficulté, qu’il s’agisse de l’homme ou de la femme. La partenaire d’un homme défaillant est la première observatrice des symptômes et le meilleur atout pour éviter qu’ils ne se pérennisent. Elle fait cependant partie du tableau clinique et nous devons nous en faire une alliée. *Philippe Brenot. Les Mots du sexe, l’Esprit du temps, 2000
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