Publié le 13 déc 2011Lecture 4 min
Attention, un symptôme sexuel peut en cacher un autre !
Philippe BRENOT, Directeur des enseignements de sexologie et sexualité humaine à l’université Paris-Descartes
Le symptôme sexuel est toujours difficile à énoncer, d’abord au conjoint, ensuite au médecin. On sait combien le trouble érectile est masqué, caché, porteur de honte pour l’homme qui le ressent, avec très souvent l’impossibilité d’en parler à sa compagne. La moitié des hommes en parlent aujourd’hui facilement à leur compagne, un tiers au médecin, et 10 % seulement seront bien suivis et traités. Nous avons de réels progrès à faire.
Certains hommes vont ainsi se « retourner dans le lit », évitant la réalité, pour ne pas montrer leur insuffisance ou être confrontés à l’échec sexuel. Le clinicien est ainsi fréquemment le témoin d’un trouble du désir dans le couple, souvent abordé par la femme qui s’exprime ainsi : « Mon mari n’a plus de désir pour moi, il ne m’approche plus… », alors que cet homme, arc-bouté sur une première panne émotionnelle, s’est ensuite réfugié dans un refus de la sexualité pour ne pas « avouer son crime » ! C’est à nous, cliniciens, d’identifier le trouble et de faire un diagnostic sexologique. Les temps ont cependant changé, la sexualité est mieux comprise et surtout, les femmes sont aujourd’hui beaucoup plus accompagnantes des difficultés masculines qu’elles ont pu l’être auparavant. Beaucoup de difficultés sexuelles sont ainsi facilement levées par une attitude de compréhension dans le couple. La peur de la panne Cet homme, blessé dans sa virilité, dans son identité, est alors dominé par une angoisse d’anticipation qui lui fait craindre un nouvel échec. Mais si cet homme redoute le retour de la panne, certaines femmes ont aussi des craintes par rapport au symptôme sexuel auquel elles ne sont pas préparées et qu’elles ne comprennent pas. Ces femmes sont alors désemparées, ne sachant comment faire. C’est le cas de Mélanie qui est venue me consulter pour une absence de sexualité dans le couple due à une succession d’angoisses ayant pour objet central : la panne. Mélanie et Jérôme sont âgés de 35 et 37 ans, ils sont tous deux cadres dans le domaine bancaire et se sont rencontrés dans leur milieu professionnel. Ils ont tous deux vécu un couple précédent et ont eu des enfants qui vivent aujourd’hui avec eux. La famille recomposée est récente. Jérôme est un garçon sensible et très amoureux, mais dominé par l’angoisse. Il a connu à plusieurs reprises des difficultés émotionnelles dans sa sexualité, que ce soit une éjaculation rapide au début de sa vie sexuelle puis, à quelques reprises, dans des moments forts de sa vie personnelle, une panne itérative qui ne portait pas à conséquence, car il y attachait peu d’importance. Lors de leur rencontre, et comme à son habitude, Jérôme a eu une panne, il était très amoureux et c’était un signe de l’amour ! En face, Mélanie a été « terrorisée » par cet événement pour lequel elle n’était pas préparée, elle en témoigne : « Je suis terrorisée par la panne, j’ai peur, j’ai peur, j’ai peur…je ne sais pas comment réagir. En fait, je me suis sentie coupable de ne pas susciter le désir de Jérôme. J’ai tout de suite pensé que c’était moi la coupable, que j’étais moche, pas désirable, que je n’avais aucun charme, que j’étais nulle et qu’il allait me quitter. » À la suite de cet épisode, le désir de Mélanie s’est éteint et elle n’a plus osé approcher Jérôme, ce qui n’a pas arrangé la panne circonstancielle de cet homme amoureux, trop sensible, qui s’est organisée en un trouble pérenne. Aujourd’hui, ils font le bilan de leur couple : ils sont très amoureux, vivent ensemble et se connaissent depuis un an, mais n’ont quasiment pas de sexualité. Leur anxiété mutuelle s’est liguée contre le lien amoureux pour inhiber le désir chez l’un puis chez l’autre. La solution est certainement dans une prise en charge du couple pour éviter de faire du porteur de symptôme un « bouc émissaire » afin de lever l’anticipation de l’échec. La morale de cette histoire En matière de sexualité, ne pas s’en tenir au symptôme présenté par l’un des deux partenaires mais consulter le couple, en voyant chacun séparément, pour comprendre la dynamique du symptôme sexuel et du symptôme en miroir, puis voir le couple ensemble pour les orienter dans la gestion de l’érotisme et de l’excitation et lever leurs craintes mutuelles.
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