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Infectiologie

Publié le 25 sep 2024Lecture 5 min

Comment prévenir l'herpès néonatal

Denise CARO, d’après la communication « Transmission postnatale de l’herpès » du Dr Élise Bouthry, Pari(s) Santé Femmes 2024

Bien que peu fréquent l’herpès néonatal est une pathologie grave associée à un taux de mortalité élevé. Il importe de mieux comprendre les modes de transmission et les facteurs de risque afin de pouvoir procéder à un diagnostic et à un traitement précoces. Les résultats d’une étude française en vie réelle éclairent la situation.

Un herpès néonatal correspond à une infection par le virus Herpes simplex de sérotype 1 (HSV‐1) ou de sérotype 2 (HSV‐2) chez un nouveau‐né âgé de moins de 42 jours (6 semaines). Au niveau mondial, son incidence globale est estimée à 10/100 000 naissances vivantes, et les infections HSV‐2 sont majoritaires par rapport à celles HSV‐1 (60/40)(1). En France, on ne disposait pas jusqu’à présent de données récentes. Il y a une vingtaine d’années, on estimait à environ 25 le nombre de cas d’herpès néonatal par an. Dans la très grande majorité des cas, la contamination se fait pendant l’accouchement (85 % en perpartum), dans 10 % des cas en postpartum et dans 5 % durant la grossesse. Les facteurs de risque sont : une primo‐infection de la mère, des lésions génitales lors de l’accouchement, un accouchement par voie basse, une rupture des membranes prolongée, une effraction de la barrière cutanée (forceps ou autres), la prématurité. Dans 40 % des cas, il s’agit d’un herpès cutanéo‐muqueux, dans 30 % d’une forme neurologique et dans 30 % d’une infection disséminée(2‐4). Pour chacune de ces formes, les manifestations cliniques, le délai d’apparition et la gravité diffèrent. • L’herpès néonatal cutanéo-muqueux est localisé au niveau de la peau, des yeux et de la bouche. Un test PCR à partir d’un prélèvement au niveau de ces sites confirme le diagnostic. Les manifestations cliniques apparaissent entre le 8e et le 12e jour de vie. Le pronostic est constamment favorable si un traitement par acyclovir est mise en place rapidement. • La forme neurologique encéphalitique se manifeste par des convulsions, une hypotonie, des mouvements anormaux, une léthargie voire un coma. Les signes cliniques apparaissent plus tardivement, entre le 16e et le 19e jour de vie. Le diagnostic virologique repose sur la mise en évidence d’HSV‐1 ou d’HSV‐2 dans le liquide céphalo‐rachidien par PCR. La mortalité initiale est de 6 %, et 30 % des survivants gardent des séquelles neuro-senorielles. • La forme disséminée est la plus grave. Les signes cliniques apparaissent précocement, entre le 5e et le 10e jour. Ils touchent différents organes et s’expriment sous la forme d’un sepsis néonatal, d’une hépatite aiguë ou fulminante, d’un choc, d’une coagulation intravasculaire disséminée, d’une pneumopathie. Il peut également y avoir une atteinte cutanée ou neurologique. HSV‐ 1 ou HSV‐2 est retrouvé dans le sang par PCR. La mortalité est élevée, environ 30 %, en dépit d’un traitement antiviral ; les séquelles sont fréquentes (20 à 50 %), notamment sous forme de récurrences d’herpès cutanéo‐muqueux(2,5,6). Les anticorps maternels transmis à l’enfant en fin de grossesse (immunité passive) offrent une protection au nouveau‐né. Les anticorps spécifiques apparaissent 2 à 3 semaines après la primo‐ infection(7), et 80 % des herpès néonataux surviennent chez des enfants nés de mères ne se sachant pas infectées. On estime que 2 à 3 % des femmes enceintes auront une séroconversion durant leur grossesse(4,8‐10).   Données françaises en vie réelle   Ces données générales ont été comparées à celles retrouvées dans deux centres de référence de la région parisienne (Bicêtre et Antoine‐Béclère) entre 2013 et 2023(11). Les auteurs de ce travail ont recueilli les données cliniques, virologiques, biologiques, épidémiologiques, chez les nouveau‐nés et chez les mères. Le diagnostic était établi par PCR. Trente‐huit herpès néonataux ont été enregistrés dans ces deux centres qui assurent 6 000 accouchements annuels. L’incidence était de 5,5 cas/100 000/an (IC 95 % : 0,9‐10). La majorité (79 %) des herpès de l’étude était asymptomatiques (30/38). Parmi les huit formes symptomatiques (21 %), il y avait : quatre infections disséminées, deux formes neurologiques et deux formes cuta néo‐muqueuses. L’incidence des formes symptomatiques était de 1,2/100 000/an. Trente‐deux des 38 herpès néonataux étaient dus à HSV‐1 (84,2 %) ; ce sérotype était présent dans la moitié des formes symptomatiques. Les formes neurologiques étaient dues à HSV‐2. À noter que 10 femmes étaient séronégatives vis‐à‐vis du sérotype responsable de l’infection de leur enfant(11). « La prépondérance de l’HSV‐1 est peut‐être due à la dimi nution de la séroprévalence d’HSV‐1 chez les adultes jeunes et à des rapports sexuels uro‐génitaux plus fréquents », a indiqué le Dr Élise Bouthry (CHU d’Angers)(12). « Ces deux facteurs pourraient favoriser une primo‐infection génitale à HSV‐1 chez les femmes enceintes. » Dans l’étude française, la mortalité globale était de 13 %, celle des formes symptomatiques de 62,5 %, et celle des formes disséminées de 100 %(11). Les deux tiers des infections étaient dues à une contamination postnatale précoce. Par ailleurs, toutes les infections dues à une transmission oro‐labiale maternelle (23/23) qui avaient bénéficié d’un traitement par acyclovir sont restées asymptomatiques. « D’où l’importance du dépistage », a insisté le Dr Bouthry. L’HSV‐1 est plus susceptible d’être transmis que le HSV‐2 au moment de l’accouchement(4). Il peut aussi être transmis en période postnatale par l’entourage (le père, par exemple) ou dans le cadre d’une infection nosocomiale, comme cela est décrit dans la littérature.   À retenir   Ce travail a le mérite de fournir les premières données d’incidence de l’herpès néonatal en situation réelle en France. Il montre l’importance du dépistage néonatal quand la situation maternelle le suggère. « La prise en compte de l’herpès dans les algorithmes de prise en charge du sepsis néonatal est très souhaitable », énonce le Dr Élise Bouthry. Le faible poids des infections initiales (primaires ou non) dans la survenue d’herpès néonatal retrouvé dans l’étude (24 %) contraste avec les données de la littérature (60 à 80 %). De même, la mortalité globale de 13 % est inférieure aux données de la littérature (20 à 25 %)(2,13). En revanche, les infections postnatales (65,8 %) semblent plus fréquentes que dans d’autres publications (33 % dans une récente étude australienne)(10). « Aussi instructive soit‐elle, notre étude a certaines limites, a reconnu le Dr Bouthry. Elle est rétrospective, porte sur un faible effectif et se limite à une partie de la région parisienne. La réalisation d’enquêtes plus larges est souhaitable. »

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