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Grossesse

Publié le 07 juin 2024Lecture 7 min

Nouvelles recommandations pour la prise en charge du SOPK

Michèle DEKER, Paris

Le syndrome des ovaires polykystiques est une maladie chronique, sans doute due à une reprogrammation in utero, responsable de diverses complications : résistance à l’insuline, dysfonction du tissu adipeux, gain de poids excessif, adrénarche, pubarche et ménarche précoces, et leurs corollaires : diabète, dyslipidémie, maladies cardiovasculaires, cancer de l’endomètre. De nouvelles recommandations pour la prise en charge du SOPK sont parues en 2023(1).

Le diagnostic de syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est basé sur les critères de Rotterdam, qui demandent la présence de 2 des 3 critères suivants : trouble du cycle, hyperandrogénie et ovaires polykystiques (CFA) à l’échographie, après exclusion des autres troubles du cycle ou d’hyperandrogénie (hyperprolactinémie, bloc en 21-OH, tumeur ovarienne ou surrénalienne, Cushing), d’où la nécessité de doser prolactine, FSH, LH, E2 à J2-J4, TSH ; 17OHP à J2-J4 et testostérone totale. La nouveauté réside dans la possibilité de doser l’hormone anti-müllérienne (AMH) à la place de l’échographie, hormis chez l’adolescente pour laquelle les troubles du cycle et les signes d’hyperandrogénie sont fréquents et il n’y a pas de seuil validé pour la testostéronémie, le CFA ou l’AMH. Le diagnostic de SOPK ne pourra être confirmé que 8 ans après la ménarche. L’interprétation de l’AMH doit tenir compte de l’âge, de l’IMC, de la contraception hormonale et du moment du cycle menstruel. En l’absence de seuil défini, il faut se baser sur les seuils de chaque laboratoire.   Dépistages après diagnostic Le dépistage des troubles de la glycorégulation – au mieux par hyperglycémie provoquée orale (75 g de glucose) – doit être fait dès le diagnostic de SOPK et répété régulièrement. Il en est de même du dépistage des autres facteurs de risque cardiovasculaire (PA, TG, HDL-C). Il faut également dépister un syndrome d’apnées du sommeil. Le dépistage du cancer de l’endomètre n’est pas systématique. Il faut cependant l’évoquer en cas de troubles sévères du cycle, d’obésité, d’insulinorésistance, en réalisant une échographie pelvienne ± biopsie d’endomètre. La prévention repose sur la contraception estroprogestative ou progestative, voire des progestatifs (4 cures de 10 jours/mois/an). Les femmes souffrant de SOPK ont une prévalence augmentée de dépression, d’anxiété, de troubles du comportement alimentaire et d’une mauvaise image de soi, qui impactent la qualité de vie. Elles souffrent aussi du retard au diagnostic. Outre les conseils hygiéno-diététiques, en particulier les recommandations d’activité physique visant à diminuer la prévalence du syndrome métabolique et à améliorer le bien-être émotionnel, une prise en charge médicamenteuse de l’insulinorésistance est envisageable. La metformine seule peut être utilisée chez les femmes avec SOPK et IMC ≥ 25 kg/m2 pour améliorer le profil métabolique, en débutant à la dose de 500 mg/jour et en augmentant progressivement toutes les 1-2 semaines jusqu’à 2 500 mg. Les inositols (seconds messagers de l’insuline), dotés d’une action ovarienne, ont des effets métaboliques plutôt favorables à la dose de 4 g/jour ; malgré des résultats encourageants, le niveau de preuve est encore faible, et ils ne sont pas considérés comme un traitement de l’infertilité selon les recommandations. Les GLP-1 RA, dont la prescription est approuvée uniquement dans le traitement du diabète 2 et de l’obésité, donneraient de meilleurs résultats que la metformine sur la sensibilité à l’insuline et l’ovulation. Il en est de même de la chirurgie bariatrique. La prise en charge des troubles du cycle est importante, notamment pour la prévention du cancer de l’endomètre dont le risque est augmenté en préménopause chez les femmes avec SOPK. Elle fait appel soit au traitement séquentiel par la progestérone, soit à la pilule estro progestative. Il n’y a pas de pilule spécifique du SOPK. Il est recommandé de choisir une pilule associant la dose minimale efficace d’estrogène, soit 20-30 μg d’éthinylestradiol (EE) ou son équivalent. Il faut aussi considérer les pilules à base d’estrogène naturel, étant donné leurs bénéfices sur le profil de risque métabolique et les effets secondaires, en tenant compte des contre-indications dans cette population dont le risque métabolique de base est élevé. La prise en charge de l’hirsutisme est basée sur les règles hygiéno-diététiques, les mesures cosmétiques et la contraception estroprogestative en 1re intention. Si cette contraception s’avère inefficace au bout de 6 mois ou est contre-indiquée, il faut envisager d’adjoindre un anti-androgène (spironolactone 25-100 mg/jour, hors AMM). Le laser préférentiellement ou la lumière pulsée peut être envisagé pour traiter l’hirsutisme, surtout au niveau du visage ; davantage de séances qu’en l’absence de SOPK sont généralement nécessaires.   Quelle contraception en cas de SOPK ? Les femmes avec un SOPK ont une fertilité intrinsèque normale d’où la nécessité d’une contraception efficace. Toutefois cette contraception ne doit pas aggraver les symptômes du SOPK (hyperandrogénie, insulinorésistance, fertilité) mais les améliorer et prévenir le risque carcinologique du SOPK. L’insulinorésistance fait partie du syndrome métabolique. Les troubles du cycle sont responsables des troubles de la fertilité dont le vrai marqueur en cas de SOPK est l’hyperandrogénisme, qui ne doit donc pas être augmenté par la contraception. POP ou COC ? Toutes les contraceptions hormonales ont la même efficacité intrinsèque. Celle-ci dépend de l’observance et de la persistance du traitement, ce qui sous-entend que la contraception doit améliorer l’acné, l’hirsutisme et les troubles des règles. La tolérance est par ailleurs étroitement liée au contrôle du cycle, en particulier dans le SOPK. En termes de tolérance et de persistance, les progestatifs seuls (POP) occasionnent fréquemment des troubles du cycle (la drospirénone moins que le désogestrel), responsables d’arrêt du traitement contraceptif. Le contrôle du cycle est meilleur sous contraception estroprogestative combinée (COC), d’où une meilleure persistance. EE ou estrogène naturel ? Nous disposons de multiples COC, à base d’éthinylestradiol (EE) ou d’estrogène naturel estradiol (E2V, E2) ou estétrol (E4). La régularité des cycles est un peu meilleure avec la combinaison estétrol/drospirénone (E4/DRSP) comparativement aux combinaisons E2V/diénogest ou E2/nomégestrol acétate. Cet effet s’explique ainsi : au niveau de l’endomètre, les progestatifs stimulent la 17 bêta-hydroxystéroïde déshydrogénase, ce qui a pour effet de transformer l’estradiol (E2) en estrone (E1) et de diminuer les estrogènes au niveau endométrial. Cet effet n’est pas retrouvé avec l’EE et l’E4. Donc, pour un bon contrôle du cycle en utilisant un progestatif, il ne faut pas utiliser d’estrogène sensible à la 17 bêta HSD. Il existe plusieurs méthodes pour aboutir à un effet anti-androgène : – diminuer la production d’androgènes par l’ovaire et la surrénale en donnant un progestatif ; – augmenter la SHBG : les estrogènes augmentent la protéine porteuse de la testostérone, d’où une diminution de la testostérone (T) libre ; – utiliser un progestatif qui est un inhibiteur compétitif de la fixation de la T sur son récepteur, d’où moins de 5-alpha réductase donc moins de formation de dihydrotestostérone (androgène actif). Un effet antiandrogénique sans augmenter le risque TE Dans le cadre de la COC, ce sont les pilules associant éthinylestradiol et progestatif antiandrogénique qui augmentent le plus la SHBG. Toutefois, l’élévation de la SHBG est corrélée au risque thromboembolique. Le meilleur rapport bénéfice-risque serait obtenu en associant un progestatif ayant une activité antiandrogénique à un estrogène qui n’augmente pas la SHBG, responsable d’une augmentation de la résistance à la protéine C activée (PCA), donc du risque thrombo-embolique. Or ce risque est déjà associé au SOPK, indépendamment du poids, via l’insulinorésistance. Il faudrait donc ne pas abaisser la SHBG mais ne pas l’augmenter artificiellement. L’effet des COC sur la SHBG varie selon les progestatifs associés et le type d’estrogène : l’association E4/DRSP n’augmente pas la SHBG comparativement à EE/DRSP. De même, l’augmentation de la résistance à la PCA est statistiquement inférieure avec l’E4/DRSP versus EE/LNG et EE/DRSP. L’insulinorésistance est au centre du SOPK, elle augmente le syndrome métabolique et les maladies cardiovasculaires ; elle augmente aussi les cancers, en particulier de l’endomètre, et la dépression. Elle est au centre de l’ovaire polykystique, en particulier en aug mentant la pulsatilité de la LH, donc la production d’androgènes, responsable d’anomalies de l’ovulation. Globalement les pilules habituelles (EE/LNG) n’augmentent pas l’insulinorésistance, sauf en cas d’ovaire polykystique. Chez les femmes SOPK, la COC à base d’EE entraîne une baisse de la sensibilité à l’insuline avec une élévation de la testostérone totale. Ces pilules sont donc contre-productives dans l’ovaire polykystique. A contrario, les pilules aux estrogènes naturels n’ont pas d’effet sur l’insulinorésistance, mais il n’y a pas d’étude chez les femmes SOPK.   En conclusion Pour être efficaces sur les symptômes du SOPK, à savoir l’hyperandrogénie et les troubles de la fertilité, les contraceptions hormonales ne doivent pas être androgéniques. Il faut donc éviter les pilules avec un progestatif androgénique tel que le lévonorgestrel et préférer un progestatif antiandrogénique, tel que la drospirénone, auquel on peut adjoindre la spironolactone si nécessaire. Les POP, du fait de leur mauvaise persistance sont plutôt réservées aux contreindications des COC. Dans la mesure où le risque thrombo-embolique est plus élevé dans le SOPK, il vaut mieux éviter les COC à l’EE et préférer une COC avec un estrogène naturel, métaboliquement neutre, qui en outre n’aggrave pas l’insulinorésistance.

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