Publié le 01 mar 2024Lecture 6 min
Chirurgie des pathologies gynécologiques bénignes - Les apports de l’innovation vNOTES : la technique cœlioscopique par voie vaginale
Marie SPARTE, Paris
Seulement un quart des patientes profitent d’une chirurgie par voie vaginale en cas d’hystérectomie ou d’annexectomie malgré les recommandations de l’American College of Obstetricians and Gynecologists (ACOG)* et de la dernière revue de la Cochrane Database. Pourquoi revenir à cette voie d’abord et quels sont les bénéfices attendus pour les patientes et les praticiens avec la technique de chirurgie mini-invasive vNOTES (Vaginal Natural Orifice Transluminal Endoscopic Surgery) ?
Pour la prise en charge chirurgicale des pathologies gynécologiques bénignes plusieurs techniques peuvent être utilisées. Sur la base de nombreuses études, la revue systématique Cochrane (2015)(1) a mis en avant l’intérêt de privilégier l’approche vaginale à chaque fois que cela est possible. En France, les deux techniques préférentiellement employées ces dernières années sont la laparoscopie et la laparotomie(2). Les arguments généralement énoncés pour justifier la moindre utilisation de l’approche vaginale sont l’insuffisance de formation ou d’expérience, le manque de visibilité, d’accès, voire d’innovation(3).
C’est pourtant dans cette voie d’abord qu’a eu lieu la plus récente des avancées avec la technique vNOTES. Cette chirurgie endoscopique par voie vaginale a l’avantage d’associer les bénéfices de la cœlioscopie (précision, qualité de vision) à ceux de l’accès par voie naturelle (absence de cicatrice abdominale, récupération rapide). Les preuves cliniques sur l’efficacité du vNOTES reposent actuellement sur deux études prospectives randomisées, toutefois de nombreuses autres sont en cours en France et en Europe. D’ores et déjà, le vNOTES est reconnu comme une technique chirurgicale à part entière, avec, pour preuve, son intégration dans l’analyse de la dernière revue Cochrane sortie très récemment(4).
Fibromes, polypes, adénomyose et vNOTES
L’évolution ou la gravité de certaines pathologies bénignes telles que les fi bromes utérins, l’adénomyose ou les hémorragies fonctionnelles rebelles aux traitements médicamenteux nécessitent parfois une hystérectomie.
Pour ces indications, l’intérêt de la technique vNOTES versus cœlioscopie a été étudié par l’étude, randomisée monocentrique en simple aveugle HALON, conçue comme une étude de non-infériorité, incluant 70 femmes réparties en deux groupes parallèles(5).
Les résultats ont montré une équivalence en termes d’efficacité entre les deux techniques, sans aucune conversion, avec une diminution de la durée opératoire et d’hospitalisation ainsi qu’une tendance à la réduction des complications avec le vNOTES.
Concernant la douleur, celle-ci s’est également révélée moins importante avec cette méthode, et ce, quel que soit le moment auquel elle a été évaluée en postopératoire (schéma 1).
Schéma 1. Score de douleur (EVA).
Gros utérus et vNOTES
Selon les séries, la proportion d’hystérectomies de gros utérus varie entre 20 % et plus de 40 %(6). Sur la base de la facilité d’extraction, la laparotomie est restée pendant une très longue période la voie d’abord privilégiée(6). Cependant, avec de bonnes techniques et pratiques de morcellement utérin, les hystérectomies par voie vaginale sont réalisables et rendues plus confortables et faciles désormais avec le vNOTES. Cela a été mis en évidence par une cohorte rétrospective monocentrique réalisée en France, récemment publiée dans le Journal of Minimally Invasive Gynecology, qui a comparé deux groupes de patientes ayant eu une ablation de l’utérus d’un poids supérieur à 280 g**, soit par cœlioscopie soit par vNOTES(7).
Hystérectomie par vNOTES.
Hystérectomie vNOTES avec la Plateforme d’Abord Transvaginal GelPOINT® V-Path et le Dispositif Voyant®.
Les caractéristiques des patientes n’étaient pas différentes, et le poids médian de l’organe était de 506 g dans le groupe cœlioscopie (mini : 280 g; max : 1490 g) versus 533,5 g dans le groupe vNOTES (mini : 411 g; max : 1654 g). Les résultats ont montré des différences très clairement significatives en termes de durée opératoire en faveur du vNOTES : 99 min contre 171, p < 0,001.
Concernant la prise en charge, celle-ci était réalisée en ambulatoire dans 50 % des cas pour le vNOTES contre seulement 3,7 % dans le groupe cœlioscopie.
L’analyse du sous-groupe formé par les patientes ayant un utérus de plus de 500 g a révélé des tendances similaires avec cependant une différence de temps opératoire encore plus importante entre les deux techniques (vNOTES = 105 min, cœlioscopie = 188 min) (tableau 1).
En termes de nécessité de conversion, les résultats n’ont pas montré de différence significative. Même si la proportion était plus élevée pour le vNOTES, les conversions étaient faites en faveur de la cœlioscopie dans 80 % des cas; situation repoussant ainsi une conversion vers la laparotomie.
Cette étude montre encore que la nulliparité n’aurait pas d’incidence particulière et ne serait pas non plus une contre-indication au vNOTES puisque la proportion de femmes avec un utérus de plus de 500 g et nullipares, ayant pu profiter de cette méthode, représentait plus d’un tiers des patientes.
Kyste ovarien, annexectomie, stérilisation tubaire et vNOTES
L’efficacité et l’apport de la technique endoscopique par voie vaginale dans la chirurgie annexielle ont été étudiés par l’essai NOTABLE, conçu comme une étude de non-infériorité, randomisée, contrôlée, monocentrique en aveugle en groupes parallèles qui a comparé l’ablation des annexes par cœlioscopie et vNOTES pour une pathologie gynécologique bénigne(8). L’analyse des données a montré une équivalence des deux méthodes en termes d’efficacité sans conversion. Les résultats ont aussi mis en évidence un temps opératoire plus court, des scores de douleur plus faibles, une dose totale d’analgésiques moins importante dans le groupe vNOTES, avec cependant une tendance à davantage d’événements indésirables.
Les preuves permettent ainsi de conclure que le vNOTES n’est pas inférieur à la laparoscopie pour une annexectomie réussie sans conversion.
Cas complexes et vNOTES
Certains contextes peuvent compliquer l’ablation de l’utérus ou des annexes.
La technique vNOTES se révèle alors particulièrement intéressante en cas de :
• Chirurgie annexielle associée à une hystérectomie;
• Absence de descente utérine;
• Antécédents de césarienne;
• Myome isthmique antérieur avec décollement de la vessie et ouverture du péritoine;
• Adhérences;
• Besoin d’une morcellation protégée en cas de fibrome hypercellulaire et de risque de dissémination;
• Patiente en situation d’obésité.
Le vNOTES permettrait de prendre en charge des situations complexes en réduisant les complications grâce, entre autres, à la réalisation d’hémostase et de dissection précises sous contrôle visuel, pour un plus grand confort du praticien.
Autre argument de poids : la satisfaction des patientes
Dans le choix de la technique à employer, l’avis de la patiente doit être écouté même s’il n’est pas fondé sur des preuves scientifiques. La réduction voire l’absence de cicatrice visible, la diminution de la douleur postopératoire, le retour rapide au domicile, un acte chirurgical moins traumatisant physiquement, le retour plus rapide et facile de la vie courante sont des facteurs importants pour ces femmes encore jeunes (dans la quarantaine) et en pleine activité.
Ces critères doivent aussi guider vers la technique la plus adaptée à chaque cas, le vNOTES pouvant ne pas convenir à toutes les patientes comme celles ayant de l’endométriose de la cloison recto-vaginale ou du torus utérin. Il convient de préciser que les antécédents de chirurgie ou d’infection ne sont pas une contre-indication ou une limitation à l’utilisation de cette technique.
Les études et les pratiques cliniques ont montré l’efficacité et la praticité de cette méthode qui nécessite cependant une formation spécifique, réalisée par des cœlioscopistes et vaginalistes expérimentés, pour être exécutée en toute sécurité. Elle est, à ce jour, l’une des techniques les plus novatrices et s’inscrit parfaitement dans le courant d’idées mettant en avant la chirurgie invasive ultra-minimalisée(9).
Publirédactionnel réalisé pour
D’après les présentations du Dr Géraldine Giraudet (Lille) et du Dr Aslam Mansoor (Issoire) au symposium Applied Medical au congrès de Société de chirurgie gynécolo- gique et pelvienne (SCGP), 20-22 septembre 2023, Strasbourg.
*Ainsi que celles de l’American Association of Gynecologic Laparoscopists (AAGL) et de l’International Society of Gynecological Endocrinology (ISGE).
**Critère d’un gros utérus dans la littérature.
Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.
pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.
Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :
Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :