Publié le 27 mai 2021Lecture 4 min
Orthogénie : bouleversements et évolutions des pratiques
Caroline GUIGNOT, Paris
L’actualité de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) a permis d’aborder les évoluions et débats les plus récents : facilitation de l’accès en période pandémique, pertinence de la prévention de l’alloimmunisation anti-D et prise en charge de la douleur associée au geste.
Si l’OMS a déclaré l’IVG comme un soin essentiel et urgent en période de pandémie en mars 2020, tous les pays n’ont pas adopté la même attitude : outre ceux pour lesquels l’accès était déjà considéré comme tel, certains en ont facilité l’accès, alors que d’autres ont mis cette activité en arrêt partiel ou total, ou n’ont pas pris de mesures spécifiques pour la faciliter. La France a, de son côté, adopté plusieurs mesures facilitatrices durant le confinement, hors établissement de santé : allongement du délai de l’IVG médicamenteuse (IVGM) de 7 à 9 semaines d’aménorrhée (SA), accès à la téléconsultation pendant les IVGM, délivrance des médicaments abortifs avec avance de frais en pharmacie, mise à disposition de l’autotest urinaire Check Top en post-IVG et allongement de l’accès à l’interruption médicale de grossesse au-delà de 14 SA pour motif maternel psychosocial.
Il est encore trop tôt pour établir précisément l’impact de la pandémie sur l’activité d’IVG en France, mais quelques données déjà disponibles suggèrent une baisse du recours global aux IVG au printemps dernier dans toutes les régions hors Pays de la Loire et Bretagne, une augmentation des forfaits IVGM (de 3 000 à 5 000 par mois) et des demandes d’IVG en terme dépassé en post-confinement, notamment en région parisienne, en corrélation avec l’augmentation des violences faites aux femmes.
La simplification de l’accès à l’IVG entreprise en période pandémique pourrait être maintenue. Plusieurs propositions ont été faites à la Haute Autorité de santé (HAS) en ce sens : développement de la téléconsultation pour tout ou partie des consultations nécessaires, allongement du délai d’IVGM à 9 SA, autotest urinaire en alternative à l’échographie de contrôle ou au dosage des bHCG. La HAS devrait donner ses conclusions courant février 2021.
Prévention immunisation rhésus et iVg
L’allo-immunisation anti-D de la mère rhésus négatif (Rh-) contre son fœtus Rh+, peut avoir des conséquences graves voire dramatiques pour la grossesse en cours ou ultérieure, ou pour l’enfant in utero ou nouveau-né.
Dans ce contexte, la prophylaxie systématique anti-D a permis de réduire la fréquence de l’alloimmunisation de 16,5 à 2,7 cas pour 1 000 grossesses depuis les années 1970. Cette prophylaxie doit-elle être systématique au cours de l’IVG ? En réalité, les données relatives au risque d’allo-immunisation dans ce contexte sont relativement rares : celles du CNRHP (Centre national de référence en hémobiologie) suggèrent que les cas sont relativement rares chez les femmes ayant eu recours à l’IVG. Des études récentes montrent que le passage de cellules fœtales dans la circulation maternelle est relativement rare au cours des premières SA(1). Par ailleurs, le taux d’allo-immunisation est apparu identique parmi les femmes canadiennes et les femmes hollandaises, soumises respectivement à une prophylaxie systématique au cours de l’IVGM versus pas de prophylaxie au cours des 7 premières SA(2). Aussi, certains pays ont d’ores et déjà modifié leurs recommandations sur le sujet. Une adaptation des pratiques françaises de prophylaxie lors de l’IVG pourrait être envisagée dans le cadre d’une discussion éclairée et d’une décision partagée avec la femme, sur la base de plusieurs éléments : désir ultérieur de grossesse, terme de la grossesse, rhésus du partenaire, contraintes pratiques liées à la détermination Rh.
Quelles alternatives complémentaires à l’analgésie locale durant l’IVG ?
L’anesthésie locale peut être insuffisante pour un vécu optimal de l’IVG. Afin de la rendre non traumatisante, la prise en compte de l’anxiété et du ressenti de la douleur est importante, sachant que cette dernière peut être favorisée par la nulliparité, un jeune âge, une dysménorrhée ou encore l’anxiété ou la dépression sous-jacente. Un premier élément repose sur la bienveillance et le choix du vocabulaire, qui permet d’éviter les termes favorisant l’inquiétude ou l’anticipation de la douleur. L’acupuncture et l’électro-acupuncture ont été décrites comme réduisant la douleur et l’anxiété liées à l’IVG(3,4). Les données relatives à l’hypnose suggèrent une réduction du recours au pro oxyde d’azote et une diminution de la douleur, les techniques linguistiques, comportementales ou conversationnelles issues de l’hypnose pouvant aussi apporter un meilleur soulagement(5,6). La musicothérapie réduirait aussi les scores de douleur et d’anxiété post-IVG(7). Les approches de réalité virtuelle apporteraient également une plus grande satisfaction postopératoire(8). Certaines peuvent être combinées avec succès (hypnose en réalité virtuelle par exemple). Les données sont en revanche insuffisantes concernant l’aromathérapie et la thérapie par le chaud. Enfin, la présence d’une doula reste un accompagnement apprécié par les femmes dans ce contexte(9).
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