Publié le 13 déc 2015Lecture 6 min
Comment prendre en charge un AGC (atypical glandular cells) ?
M.-D. BENMOURA, Marseille
Les frottis de type AGC (atypical glandular cells) sont exceptionnels et représentent moins de 1 % de toutes les anomalies des frottis cervico-utérins.
Avec 10 sous-catégories cytologiques, des organes différents à explorer, un taux de lésions et de cancers très variable selon les séries, ils sont d’un diagnosic difficile pour le cytologiste et nécessitent une prise en charge souvent complexe pour le clinicien.
Définition des AGC L’ancienne dénomination d’AGUS (atypical glandular cells of undetermined significance) a été remplacée, pour éviter la confusion avec le terme d’ASC-US, par celle d’AGC : le tableau 1 présente le système Bethesda 2001 et la subdivision de ces anomalies. Dans la majorité des cas, les aspects cytologiques permettent de différencier les cellules endométriales et endocervicales. La conduite à tenir dépend de cette localisaion et justifie donc de faire cette distinction quand elle est possible(1). Fréquence des AGC Elle est très faible. Les métaanalyses de Cangiarella et Schnatz et la série de Zhao uilisées par le CNGOF en 2009 pour la mise à jour sur la conduite à tenir après frottis AGC montrent que la fréquence des AGC va de 0,08 à 2,1 % et celle des lésions significatives de 17 à 79,5 %, dont 0 à 22,7 % de cancers(2-4) (tableau 2). La série récente de Sun-Suk différencie deux groupes selon le type de recueil pour le frottis : 51 510 conventionnels et 2 650 en milieu liquide(5). À partir de ces deux types de recueil, les résultats de ces frottis de type AGC ont été regroupés et étudiés en deux sous-catégories seulement (AGC-NOS et AGC-FN), ce qui fait apparaître certaines différences : les frottis en milieu liquide montrent des taux d’AGC, d’AGCNOS et d’AGC-FN plus importants que ceux des frottis conventionnels, mais ces différences ne sont pas significatives (tableau 3). Par ailleurs, les anomalies glandulaires cervicales (AGC-EC ou AGC-NOS) sont souvent associées à des anomalies malpighiennes (ASC ou SIL), alors que les lésions endométriales font plus souvent l’objet d’un frottis AGC-EM(4-6). Corrélations cytohistologiques Les frottis AGC sont associés, dans 10 à 39 % des cas, à des lésions de haut grade malpighiennes ou glandulaires (donc plus souvent que les ASC-US)(1), avec une néoplasie cervicale intraépithéliale (NCI) retrouvée dans la moitié des adénocarcinome in situ(AIS)(7). Le taux global de lésions définies comme significaives varie considérablement d’une série à l’autre, en raison des critères retenus pour le diagnosic cytologique ou histologique, de la qualité du suivi et des biopsies(2-6) (tableau 2). La revue de Schnatz retrouve 8,5 % de lésions de bas grade et 11,1 % de lésions de haut grade, 2,9 % d’AIS et 5,2 % de cancers (dont 57,6 % de l’endomètre, 23,6 % de l’endocol, 6,4 % des ovaires et des trompes, 5,4 % de cancers malpighiens du col et 6,9 % autres)(3). Corrélations cytohistologiques en fonction de la sous-catégorie cytologique Dans l’étude de Sun-Suk (qui n’uilise que 2 sous-catégories), les corrélations cytohistologiques selon la sous-catégorie cytologique sont les suivantes : les AGCNOS étaient liés à 23,6 % de lésions précancéreuses, y compris malpighiennes et à 14,6 % de lésions cancéreuses (vs 17,9 % et 57,1 % pour les AGC-FN)(5). Les AGC-FN paraissent liés à des lésions plus graves que les AGCNOS, mais le petit nombre de lésions n’a pas permis de conclure à une différence significative. Les cancers diagnostiqués ont été : adénocarcinome du col, cancer de l’endomètre, du sein, de l’ovaire et de l’estomac. Au terme de ce bilan, environ 50 % de ces frottis resteront sans explication(6) ; donc la surveillance ultérieure s’impose, d’autant que la lésion peut se situer à distance de l’appareil génital. En effet, l’endomètre pouvant être le siège de métastases dont le cancer primitif est gynécologique ou non, les grandes séries font état de quelques cancers non utérins ou même extragénitaux (trompe, ovaires, seins, côlon, estomac, etc.) dont il va falloir tenir compte en cas d’AGC, surtout si le bilan initial n’a pas abouti à un diagnostic de lésion et si le frottis anormal se répète(5-6). Fréquence des HPV En cas d’AGC, les HPVHR sont retrouvés dans 30,4 % des cas dans la métaanalyse de Schnatz(3) et dans 38,4 % des cas pour SunSuk(5), incitant à rechercher en priorité des lésions cervicales malpighiennes ou glandulaires. Les AGC selon l’âge Les AGC sont plus souvent associés à des lésions cervicales chez les patientes de moins de 40 ans et à des lésions de l’endomètre chez celles de plus de 50 ans(4), orientant le bilan initial selon l’âge. Les recommandaions américaines de 2012 retiennent un bas risque de cancer en dessous de 35 ans, mais un risque supérieur de CIN2+ (9 % de CIN3+ et 3 % de cancers après 30 ans), nécessitant une prise en charge correcte à tout âge(7). Conduite à tenir L’origine des lésions pouvant se trouver sur des organes différents parfois à distance de l’utérus, il est important de définir une conduite à tenir logique qui ne laisse rien au hasard et systématique. La référence aux études publiées, en plus du problème déjà cité de la rareté de ces frottis, nous aide peu car elles diffèrent sur plusieurs points (subdivision cytologique, diagnostics retenus comme significatifs, suivi des patientes, etc.). Il est donc assez difficile de se faire une idée de la conduite à tenir idéale. Nos recommandations françaises reposent sur le texte de l’Anaes de 2002, complété par une mise à jour de 2009 du CNGOF(2). Le texte de 2002 prévoit une colposcopie et un curetage de l’endocol dans tous les cas d’AGC (avec en plus un prélèvement d’endomètre en cas d’AGC-EM). La mise à jour du CNGOF pose plusieurs questions supplémentaires. Un âge supérieur à 35 ou 40 ans peut être relié à un cancer de l’endomètre et doit donc entraîner un bilan locorégional avec échographie pelvienne, curetage de l’endocol et prélèvement d’endomètre. L’utilisation d’un test HPV peut aider au diagnostic en cas de colposcopie non satisfaisante. Il est rappelé que le bilan peut être normal dans 50 % des cas et que la surveillance cytologique à 6 mois est donc indispensable pour ne pas méconnaître une lésion. En 2012 aux États-Unis, l’ASCCP a établi une mise à jour des recommandations sur la conduite à tenir en cas de frottis cervico-utérins anormaux y compris les frottis de type AGC (tableau 4)(8). Le risque de cancer de l’endomètre (KEM) est plus élevé chez les patientes plus âgées, avec facteurs de risque (métrorragies inexpliquées et anovulation chronique) et avec test HPV négatif(7). Le curetage endocervical est controversé. Le frottis endocervical à l’aide d’une cyto-brosse a une meilleure sensibilité que le curetage avec une spécificité identique, une meilleure tolérance avec moins de prélèvements insuffisants bien que le stroma soit rarement présent(7). Conclusion Les lésions en relation avec les frottis AGC peuvent être graves et provenir d’organes différents parfois extragénitaux. Les facteurs qui guident le bilan sont l’âge, la sous-catégorie du frottis et éventuellement le test HPV.
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